La littérature belge fait figure de paria dans son propre pays.
Personne ne s’y intéresse. Pour vivre, elle est obligée de s’expatrier. En matière de littérature, les éditeurs belges réalisent la plus grosse partie de leur vente à l’exportation. Quant aux auteurs, s’ils veulent avoir une chance d’être lus, ils doivent, eux aussi s’expatrier et aller voir si nos amis français veulent bien les accueillir.
La situation n’est pas neuve, malheureusement.
La Belgique est un des seuls pays au monde, et il en existe de plus petits, qui n’étudie pas sa propre littérature sur les bancs de l’école. En découle un confusion, un problème identitaire.
Les Belges sont prompts à revendiquer qu’ils ne sont pas Français, et en même temps, ils assimilent leur histoire et leur patrimoine littéraire à celui de la France. Cette assimilation est le résultat de notre ignorance. Sans les avoir lus, la majorité des Belges connaissent Proust, Balzac, Zola, mais combien peuvent citer un auteur belge ?
Il y en a pourtant de majeurs. Et cette ignorance conduit à voir, d’années en années d’excellents textes disparaitre faute de disponibilité et de visibilité.
Aujourd’hui certains auteurs et éditeurs refusent ou nient leur appartenance Belge. Au lieu d’en être fiers, ils en ont honte et insistent pour figurer au rang de la littérature française.
Discrimination, injustice ? Dans tous les cas, un appauvrissement.
Changer les mentalités
Il est primordial que les mentalités changent.
Le changement ne viendra malheureusement pas des professionnels du livre. Si changement il doit y avoir, il viendra des lecteurs.
Le marché du livre n’échappe pas à la loi de l’offre et de la demande. Si les lecteurs se mobilisent, manifestent en bibliothèque et en librairie leur volonté de se réapproprier leur littérature, les professionnels du livre suivront.
Il y a beaucoup de livres proposés sur le marché. Des bons et des mauvais. La littérature belge ne fait pas exception à cette règle. Il ne suffit donc pas de lire un livre d’un auteur belge pour être assuré de sa qualité.
Acheter ou louer un livre c’est un engagement. Financier d’abord, mais aussi l’engagement de passer du temps avec un livre auquel vous décidez d’accorder votre confiance. Rien de plus irritant que d’être déçu, frustré, ou d’avoir l’impression de s’être fait berner.
Je conseille généralement aux lecteurs de lire les premières pages d’un livre avant de se décider. Si après cette lecture vous avez envie de connaitre la suite de l’histoire, le risque d’être déçu diminue fortement.
Accorder du temps et de l’espace à la littérature belge
La place octroyée à la littérature belge en librairie et en bibliothèque est fortement restreinte. Difficile dès lors de réaliser ce « premier test ». Certains éditeurs belges offrent la possibilité aux internautes de lire le début de leurs publications en ligne, mais bien entendu, ce n’est pas la même chose que de prendre le livre en mains.
En outre, si vous n’avez pas une idée précise du titre que vous cherchez, puisque la place laissée à la littérature belge est restreinte, voir inexistante, la possibilité de « musarder » de vous laisser aller à la découverte de l’inconnu est, elle aussi, limitée, voir inexistante.
Par ailleurs, lorsqu’une place est faite en librairie à la littérature belge, ce ne sont pas forcément les meilleurs ouvrages qui s’y trouvent. Par conséquent, si vous faites preuve de curiosité, si vous décidez de vous mobiliser pour découvrir notre littérature, vous risquez, en librairie, d’être déçus. Peut-être même, au fond, donnerez vous raison à ceux qui considèrent que la littérature belge est un ghetto où il n’est guère judicieux de vous aventurer.
Il faut impérativement casser cet engrenage.
Quelques outils
Il existe des outils, souvent méconnus. Peut-être vous semblent-ils « trop sérieux ». N’hésitez pas tout de même à vous abonner à la revue le carnet et les instants leurs chroniques vous permettra déjà de prendre connaissance d’ouvrages que vous ne trouverez malheureusement jamais en librairie.
J’en appelle ici également aux bloggeurs, qui proposent à leurs auditeurs des sélections de livres qu’ils ont apprécié. Intéressez-vous à notre littérature et essayer de proposer ne fut-ce qu’un titre d’un auteur belge lors de vos sélection.
De notre côté, nous tentons, nous aussi, de vous faire connaitre, via les réseaux sociaux, les livres belges que nous estimons dignes d’intérêt.
N’hésitez pas non plus à visiter le site des maisons d’édition belges. Il y en a beaucoup, mais je peux vous en recommander quelques unes :
- Onlit, assez présente dans la presse, et l’une des rares maisons d’édition belge à être relativement bien représentée en librairie
- Weyrich, malheureusement peu présente en librairie mais qui dispose d’un système de vente en ligne très efficace. Nous vous recommandons tout particulièrement les collections Plume du coq et Noir corbeau
- Ker, qui a notamment édité la collection « Belgiques » qui a eu assez bien de retentissements dans la presse
- Murmure des Soirs , si les livres sont souvent relativement chers, ils sont généralement de grande qualité
- Les Impressions Nouvelles, qui dirige également la collection Espace Nord que nous ne pouvons que vous recommander et qui est aussi, en général, bien représentée en librairie
Il y en a d’autres, bien entendu, mais c’est un début.